[actu] Maroc : condamnation de Lahcen et Mohsine

10487286_771874096190009_7678071024762266365_nLe 19 juin 2015 Lahcen et Mohsine ont été condamné par le tribunal de Rabat à quatre mois de prison ferme pour homosexualité et obscénité. Réactions du collectif Aswat, de la soeur de Lahcen et entretien avec leur avocate.

Voir le précédent article sur leur arrestation.

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Collectif Aswat, 21 juin 2015

Le procès de Lahcen et Mohsine pour Homosexualité ne respectait pas les normes d’un procès équitable [البيان بالعربية بالأسفل]

Ce vendredi 19 Juin , le tribunal de première instance de Rabat a rendu son verdict , Lahcen et Mohsine ont écopé de 4 mois de prison ferme et une amende de 500 DH chacun pour « Homosexualité » et « Obscénité » , les avocat-e-s ont déclaré que le procès n’était point équitable .

Suite à leur arrestation le 3 Juin dernier , les deux jeunes hommes ont été poursuivi pour des actes relevant de la liberté de circulation et autres droits garantis par la constitution ainsi que les lois internationales sur les droits humains .

Maitre Khadija Rougany , avocate des deux détenus , a déclaré au Collectif « Aswat » que plusieurs infractions des conditions de procès équitable y compris les garantis fournis par le code de procédure pénal ont eu lieu ; Maitre Hassan Tass , second avocat des deux jeunes hommes a aussi assuré que le procès n’était pas équitable.
Lahcen et Mohsine ont été sujet de torture physique et psychique, diffamation, incitation à la haine et discrimination, ils ont été forcé à signer les P.V. de par des coups, menaces et violence. Leurs avocat-e-s ainsi que la mère de Mohsine l’ayant visité à la prison de Salé ont confirmés ces faits au Collectif.
La défense s’était vu refuser la demande formulé au parquet pour effectuer un test médical suite aux traces de torture visibles au niveau de leurs visages et sur les images diffusées sur la chaine nationale «Al Oula ». Les objets réquisitionnés, comme l’appareil photo, les téléphones, les sacs, ne comportent aucun élément de preuve. Les avocat-e-s avaient demandé à les voir mais leur requête fut refusé. Ce refus et la non présentation des dites preuves devant les détenus et le tribunal est contraire aux principes d’un procès équitable.
Ces violations , et principalement celle de la présomption de l’innocence avant le début du procès même comme il nous fut déclaré par Maitre Khadija Rougany font que procès ne soit guère équitable : « Le communiqué publié par le Ministère de l’intérieur, la diffamation dont les deux détenus ont été sujet, et la diffusion de leurs images montrant les traces de tortures sont les outils d’une intervention directe sur le pouvoir législatif et juridique ainsi qu’une forme de grande pression afin de l’influencer, le procès en son ensemble et le refus des demandes de la défense est le meilleur exemple de celle-ci ».
Le Collectif « Aswat » fut aussi informé que nombre de personnes dont des journalistes avaient été interdits d’accès au du tribunal lors du procès tout en donnant l’impression que l’audience était public faute de la grande présence au niveau de la salle.
Les familles des deux détenus ont confirmé à « Aswat », qu’elles n’avaient pas été notifiés des arrestations ,et qu’elle ne l’ont su qu’à travers les médias. Les familles et proches vivent dans un état de traumatisme depuis.

La mère de Lahcen a expliqué que la diffamation que le ministère de l’intérieur à orchestré sur les médias et la divulgation de l’identité de son fils en l’accusant d’avoir commis des « actes contre natures » est similaire à une condamnation à mort pour lui et sa famille , au sein d’une société qui refuse cette « accusation », elle a aussi précisé que son état de santé s’est aggravé depuis la prononciation du jugement, et qu’elle a beaucoup de crainte vis-à-vis du futur de son fils – Mohsine – après avoir purgé sa ‘peine’.
Le Collectif « Aswat » à enregistré que l’état de santé de Mohsine actuellement à la prison de Salé est très critique.

Le jugement rendu de 4 mois de prison ferme et 500DH d’amende pour chacun selon l’article 489 pour un acte sexuel entre deux personnes du même sexe est injuste , l’inexistence de preuves, l’usage d’aveux obtenu par la torture , le contexte et les circonstances ne justifiant pas une relation sexuelle entre les deux jeunes hommes en plus du fait que le seul document abordant l’ « Obscenité » était celui présenté par le policier prétendant les avoir arrêtés en flagrant délit font de ce procès , un procès incontestablement inéquitable.

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Le Collectif « Aswat » demande à l’Etat Marocain d’assumer ses obligations constitutionnels et internationales en respectant les principes de non discrimination, de protection de la vie privée et de droit à un procès équitable et ce par :
– L’arrêt des persécutions et d’arrestations de citoyen-ne-s marocain-e-s en raison de leur identité genre ou orientation sexuelle
– L’abrogation de l’article 489 du Code pénal actuel : Punissant « de l’emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de 200 à 1000DH , à mois que le fait ne constitue une infraction plus grave , quiconque commet un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe »
– La suppression de l’article 489 de l’avant-projet du nouveau code pénal , punissant « de l’emprisonnement six mois à trois ans et d’une amende de 2000 à 20 000 DH , quiconque commet un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe »

Le Collectif Aswat pour la lutte contre la discrimination fondée sur la sexualité et le genre

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Huffington Post Maroc, 21 juin 2015

La sœur de Lahcen, l’un des deux hommes condamnés pour « homosexualité » témoigne

Voir la vidéo (arabe non sous-titré).

TÉMOIGNAGE – Face à la caméra de Febrayer TV, la sœur de Lahcen, accusé d’avoir embrassé un autre homme devant la tour Hassan a fait part de ses impressions au lendemain de la condamnation de son frère à quatre mois de prison ferme et 500 dirhams d’amende pour « outrage public à la pudeur » et « acte contre nature avec un individu du même sexe ».

« Mon frère a été arrêté de manière humiliante », raconte la femme, visiblement désespérée. « Il avait reçu un invité à qui il faisait découvrir Rabat pendant la période Mawazine », poursuit la sœur de Lahcen qui note que son frère « a été violenté physiquement et psychologiquement ».

La jeune femme regrette d’avoir appris la nouvelle « à travers un portail d’information », ce qui a causé par la suite des manifestations à caractère homophobe devant le domicile des deux accusés. Après l’arrestation, pas de nouvelles du frère. « On ne nous a pas dit où il se trouvait. Après avoir cherché, nous l’avons retrouvé dans un état déplorable. Il avait le moral au plus bas », se remémore la sœur du condamné.

La sœur de Lahcen remet aussi en cause les circonstances du procès. « On a demandé à ce qu’ils ramènent son téléphone et son appareil photo avec lesquels il prenait des photos sur le site historique. Pourquoi ont-ils refusé de présenter ces preuves ? », s’insurge-t-elle. « Nous avons été très choqués par la condamnation. Est-il concevable qu’un homme commette des actes impudiques sur un site touristique ? »

« Ma mère est malade. Elle souffre de maladies chroniques, et c’est lui qui nous aide », conclut la sœur du jeune homme qui purge actuellement sa peine de prison, avant de fondre en larmes.

Par Youssef Roudab, mass-média HuffPost, 21 juin 2015
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Huffington Post Maroc, 16 juin 2015

Khadija Rougani, avocate des deux Marocains poursuivis pour homosexualité, dénonce des vices de procédure

HuffPost Maroc: Les deux Marocains qui se seraient embrassés devant la Tour Hassan sont poursuivis pour homosexualité et obscénité. Sur quoi est basée l’accusation?

Khadija Rougani: Sur rien justement, là est tout le problème. Le témoignage du policier en faction à la Tour Hassan est vague. Il y parle de gestes contraires aux bonnes moeurs et qui auraient attiré l’attention des gens, mais sans plus de précision. Nous avons demandé la convocation de ce policier au tribunal pour lui poser des questions sur ce qu’il a réellement vu. Nous avons aussi demandé à avoir accès à l’appareil photo numérique et au téléphone qui auraient servi aux deux accusés pour prendre des clichés. Ces fameuses photos existent-elles? En tout cas l’accusation ne les a pas montrées.

Vous avez demandé l’annulation des aveux des deux accusés, dénonçant au passage un vice de procédure. Sur quoi vous basez-vous?

Je me suis basée sur leurs déclarations. Ils ont affirmé avoir subi des violences physiques et morales durant leur interrogatoire: coups, insultes, humiliation. Nous avons aussi leurs photos prises après leur arrestation et qui ont été diffusées à la presse. Les deux accusés ont des traces de coups au visage.

La diffusion par le ministère de l’Intérieur des photos et des identités des accusés est-elle aussi un vice de procédure?

Oui, bien évidemment. C’est une atteinte au secret de la procédure judiciaire puisque leurs photos et leurs identités ont été diffusées dans la presse et les médias publics avant même que ne soit établie l’accusation. C’est une atteinte flagrante à la présomption d’innocence des deux accusés. Le ministère de l’Intérieur a, qui plus est, émis un communiqué où il a mélangé le cas des Femen expulsées pour s’être embrassées sur l’esplanade de la Tour Hassan et le cas de mes clients. Tout le monde a du coup fait l’amalgame entre un fait avéré, celui des Femen, et une accusation qui reste à prouver.

Lire aussi : les Femen, un féminisme de type néocolonial

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