[actu] Il y a plus de 250 ans, la dernière exécution d’un couple homosexuel à Paris

sodomites_inquisition[Article publié le 18 octobre par les mass média à l’occasion de la pose d’une plaque sur le lieu de leur arrestation.]

Une nuit d’hiver 1750, un jeune artisan et un domestique sont surpris en plein acte de sodomie: ils seront condamnés au bûcher.

Près de trois siècles après, la Ville de Paris rend hommage samedi au dernier couple homosexuel exécuté dans la capitale.

Il est presque minuit ce 3 janvier 1750 lorsque Bruno Lenoir, un cordonnier d’une vingtaine d’années, et son partenaire d’un soir, Jean Diot, employé de maison de 40 ans, sont arrêtés, ivres, rue Montorgueil, au cœur de Paris.

Selon le procès-verbal de l’époque dressé par le guet, la police chargée des rondes de nuit, les deux hommes ont été vus «en posture indécente et d’une manière répréhensible».

D’ordinaire, ce type d’affaire se soldait alors par une simple remontrance, appelée «mercuriale». Eux auront droit à un traitement plus radical.

Après un séjour de six mois dans les geôles malfamées de la prison du Châtelet et un simulacre de procès, ils écopent de la peine maximale: la mort par le feu, place de Grève, l’actuelle place de l’Hôtel de Ville, qui servait aux exécutions et aux supplices publics sous l’Ancien Régime.

La sentence, pourtant conforme à ce que la loi réservait aux «sodomites» au milieu du XVIIIe siècle, «a étonné tout le monde par sa sévérité», explique Thierry Pastorello, historien et auteur d’une thèse sur l’homosexualité masculine à Paris aux XVIIIe et XIXe siècles.

«S’agissant d’une simple sodomie, c’est un cas unique au XVIIIe siècle, on a voulu faire un exemple», assure-t-il. A cette période, d’autres homosexuels avaient été jetés au feu pour ce motif, mais ils s’étaient rendus coupables de pédophilie et de trafic de jeunes enfants.

– ‘Un crime très banal’ –

Du jardin des Tuileries à celui du Luxembourg, en passant par les quais de Seine, «la vie sodomite était très développée à l’époque» poursuit M. Pastorello. «C’était un crime très banal. Les archives montrent que la police savait très bien ce qui se passait dans certains endroits chauds», notamment les guinguettes et cabarets «connus pour leur clientèle sodomite».

Outre l’acte, les deux hommes, de simple condition, ont eu le tort de ne pas être bien nés. «Ils étaient particulièrement fragiles sur le plan social, c’était plus facile de les condamner», estime M. Pastorello. «Les jeunes nobles surpris dans des parties fines dans les bosquets de Versailles étaient renvoyés dans leurs châteaux de campagne pour se faire oublier», ajoute-t-il.

Ce n’est qu’en 1791 que le code pénal abandonne le crime de sodomie entre adultes consentants. Et il faudra attendre 1982, sous l’impulsion de Robert Badinter, ministre de la Justice de François Mitterrand, pour que l’homosexualité soit dépénalisée.

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Via l’AFP, presse au service de la Loi.

 

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